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Les grandes oreilles

By 24 septembre 2010novembre 1st, 2015Photo, Urbanités

Visite d’une friche industrielle un peu particulière.
Les grandes oreilles

Ce matin, je me décide à aller explorer cette série d’entrepôts abandonnés que j’ai repérés depuis un certain temps. On dit dans le coin qu’il y a 20 ans s’y abritaient des activités liées à la radio-diffusion et que les champs aux alentours étaient ornés d’antennes de toutes sortes, de toutes tailles. Je cause un moment avec un vieux du village voisin. Il m’explique avec le ton d’un conspirateur que tout le monde a toujours soupçonné que s’y tenaient des activités secrètes, mais sans bien savoir lesquelles. Aller-retours incessants de camionnettes, travaux permanents, équipements électriques nécessittant l’arrivée d’une ligne à haute tension… Les gens qui y bossaient ne se mêlaient pas aux autres. Il lâche le mot « espionnage ». Je souris, amusé ; raison de plus d’aller voir ce qui s’y passe.

Le site est entouré de hautes barrières surmontées de fils barbelés mais heureusement, en avançant un peu dans les fourrés, il est relativement aisé de trouver un accès. C’est chose faite. M’y voilà !

Un premier bâtiment, on dirait un ancien poste d’alimentation désaffecté. Les instructions sont claires :
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Je n’ai ni gants en caoutchouc ni tabouret isolant mais ça ne m’empêchera pas d’avancer.
Après tout, rien à craindre, le tout est relié à la terre !
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Je sors de là pour avancer vers un bâtiment un peu plus grand, qui semble avoir hébergé des bureaux.
L’installation électrique est vétuste mais colorée.
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A vue de nez, on doit être dans les années 70. Guerre froide peut-être ? Je commence à me prendre au jeu et à observer avec envie le grand bâtiment au fond, celui avec la coupole… Je continue un peu dans les locaux qui se présentent à moi, allant d’une pièce à l’autre. Je garde le bâtiment principal pour la fin.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que ceux qui occupaient les lieux n’ont pas fait de quartier lorsqu’ils sont partis.
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Et apparemment, ils étaient fondus d’électricité, chaque pièce semble équipée de son armoire électrique. Celle-ci est plutôt récente, il faudra que je cherche un peu sur le net pour comprendre quand le site a été abandonné.
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J’avance encore et je me retrouve à découvert, entouré par les hautes herbes. Pris au jeu, je regarde autour de moi, pas de gardes en armes, pas de gros chiens. Le vieux m’a fait peur… Halte à la parano, c’est juste un site industriel, rien de secret-défense. J’ai appris la carte avant de partir, je sais ce qui m’attend. Je vais juste éviter les photos extérieures ou les indices qui rendraient le site trop reconnaissable. Après tout, le spot est sympa, il a beaucoup de potentiel !
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Le seul hic dans l’histoire, c’est le bruit de ces deux hélicoptères qui s’approchent. Des touristes qui survolent le coin certainement… Mais deux hélicos… Et pourquoi ils font du stationnaire ? Je suis beaucoup moins rassuré quand je lève les yeux. Je fais une photo par réflexe mais je sais que ce n’est pas une bonne idée.
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Un des hélicos s’est un peu éloigné, le second reste. Il est gris, en stationnaire, à 150m de moi environ.
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Je n’ai jamais vu de panneau « terrain militaire ». L’arrivée de ces deux hélicos n’est pas bon signe. Surtout que celui qui est resté devant moi commence à hélitreuiller un gars en treillis cam.
Je suis presque content d’avoir fait mon service, d’avoir des vêtements kaki et d’avoir le réflexe de me jeter sous un arbre pour attendre.
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Sans bien savoir pourquoi, je me dis que je serai plus tranquille à l’intérieur, pas la peine d’attirer l’attention sur moi. Les types doivent juste être là pour s’entraîner. Je me relève, je fais le tour du bâtiment le plus proche pour me mettre à couvert, l’hélico ne peut plus me voir. Je repère un volet entre-ouvert, je prends mon courage à deux mains et le sac de mon appareil avec la troisième et, n’écoutant que ma paranoïa, j’escalade un rebord de fenêtre pour atterrir dans le bâtiment principal.
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C’est très cosy ici. La grande pièce lumineuse est entourée de bureaux et de nombreux couloirs.
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Le site a été vidé des ses principaux équipements mais, en fouillant un peu, on retrouve d’anciennes notices et des documents de travail.
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Ca cause radio, et manifestement on s’intéresse au monde entier.
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Pour m’aider, j’ai trouvé une carte du coin avec un signe « vous êtes ici » :
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Je n’avais pas remarqué l’inscription sur la porte du bureau. Ce ma fait frissonner. Je n’aime pas trop ça…
Les grandes oreilles

Les « grandes oreilles » ? Un lieu qui semble tout droit sorti d’un roman d’espionnage des années 70…

La pièce principale du bâtiment, l' »aquarium » est entouré de cabines similaires, des postes d’écoute aux portes blindées pour lutter contre les perturbations électromagnétiques – je suppose.
Chacune a sa propre installation électrique.
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Il me semble que j’entends le bruit de l’hélico s’atténuer. Je jette un oeil par une fenêtre cassée. Il s’éloigne.
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Je décide de rester là un moment, autant mettre ce temps à profit pour continuer ma visite, d’autant plus que je viens de découvrir un plan du bâtiment.
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Je passe une porte blindée pour pénétrer dans une cage de Faraday géante, aux murs recouverts de métal.
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Par terre, quelques reliquats des anciennes activités du site.
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Sur tous les murs, des cartes de la France entière, déchirées avec précipitation, parfois annotées.
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En continuant le couloir, on retrouve des équipements qui redonnent un côté humain et presque rassurant à ce lieu.
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Niveau confort, on peut mieux faire !
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Dans le registre humain, encore, un local syndical, à moins que ce ne soit juste un autocollant collé là par ironie !
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En fait, je dois être dans la cuisine du bâtiment.
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Je systématise ma visite des lieux. Pas trop rassuré, j’arpente les couloirs à la lumière d’une lampe de poche. Je « shoote » tous les détails, je garde un oeil partout.
Ici une boîte de bandes magnétiques, qui semble venir du bout du monde.
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Partout dans les bureaux, des documents jetés à terre, témoignent de l’activité du site.
On montrait un intérêt certain pour France culture en 80 ?
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Ici des équations jetées sur un coin de table.
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Là, quelques lignes d’un programme en Basic, souvenir des débuts de la programmation.
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Je découvre une nouvelle pièce, au fond du bâtiment, en haut d’un escalier, alors que je ne sais plus bien où je suis.
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L’escalier en colimaçon me donne envie de monter. Mais avant celà, je jettre un oeil aux bureaux où s’entassent papiers et composants électroniques.
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Le temps commence à passer. Sans savoir pourquoi, je suis pressé de ressortir de ce lieu qui m’opresse. Je décide de gravir l’escalier en métal.
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Je me retrouve dans la coupole. Des fenêtres, à 360 degrés, ont été murées. Les bureaux restent en place, tous équipés d’une collection de prises électriques dotées de différents voltages. J’imagine une dizaine de gars travailler ici, devant des postes de radio ou des scanners de fréquence.
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L’escalier est bien sympa, je veux le même chez moi !
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Reste maintenant à retrouver la sortie. Ce qui devait être l’entrée principale semble impraticable. Je secoue la grille, elle est verrouillée.
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Je remonte les couloirs, découvrant les vestiges de salles de réunion aux tableaux blancs témoignant de l’ardeur d’ingénieurs qualité et de consultants en conduite du changement.
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L’inscription au tableau me fait sourire…
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En marchant sur une vitre qui se brise sous mes pieds, j’en oublie mon sourire. Je ne suis pas encore sorti d’ici !
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Une dernière pièce, avec de la lumière naturelle a dû héberger un ancien calculateur HP.
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Je ne vois pas bien ce que l’étuve vient faire ici, mais je n’ai plus envie de me poser de questions. Je veux juste retrouver la sortie !

Je traverse un bureau central, celui d’un chef peut-être, avec un tableau lui offrant une vision d’ensemble de l’activité effectuée ici.
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Au regard du nombre d’équipements HS, on peut comprendre pourquoi l’activité du site a cessé !
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Au bout, la lumière, une fenêtre accessible. Heureux de retrouver le jour, je franchis l’appui de fenêtre pour me laisser tomber, 2 mètres plus bas, sur les restes d’une route menant à la grille principale. Je regarde autour de moi, plusieurs fois, j’accélère le pas et je retrouve le chemin de la sortie… avant de souffler un bon moment.